La gestion participative dans l'Eglise locale de Rimouski: L'inconfort des laics dans le processus decisionnel

De plus en plus de fidèles chrétiens manifestent des attentes devant une participation déficitaire au sein de leur Église locale, notamment en ce qui a trait à leur insertion da dans le processus décisionnel. Ils veulent sortir du cléricalisme dont ils sont victimes depuis des siècles, eu égard à la catégorisation des membres qu'induit une telle idéologie au sein de l'institution ecclésiale. Le contexte culturel d'aujourd'hui et le retour aux sources de ce qu'est l'Église obligent à repenser radicalement la question de la participation des laïcs dans la régie interne de l'institution. La présente recherche tente de déverrouiller cette impasse liée à une conception étriquée du pouvoir et de l'autorité dans l'Église.

Nous procédons à partir d'une enquête - 25 entrevues individuelles et 3 tables-rondes réunissant 27 personnes - menée dans l'Église locale de Rimouski auprès de chrétiennes et de chrétiens engagés ou non engagés dans l'institution. Notre méthode est celle de la praxéologie pastorale. Nos données d'observation nous ont vite fait poser l'hypothèse suivante: malgré les efforts de renouveau et la bonne volonté, nous sommes devant un modèle ecclésiologique pyramidal entraînant au plan institutionnel un cadre organisationnel centralisateur et autoritaire; or, un modèle ecclésiologique communionnel pourrait générer au plan institutionnel un cadre organisationnel autre, où tous les acteurs seraient parties prenantes du processus décisionnel. C'est là, à notre avis, une approche organisationnelle qui traduit le mieux l'intuition communionnelle qui est au fondement de la réalité ecclésiale.

La recherche se développe en trois parties. Dans la première partie, intitulée Des propos éloquents sur une situation incongrue, nous précisons les objectifs de l'enquête, établissons le cadre de l'analyse, situons l'Église locale de Rimouski, relevons et analysons ce qu'on nous a dit sur l'Église rimouskoise comme organisation et sur la gestion des communautés paroissiales. Il en ressort que les membres voient les structures actuelles trop liées à une conception étroite de l'autorité des ministres ordonnés. Dans la deuxième partie que nous intitulons Une organisation ecclésiale appelée au changement, nous procédons à une double interprétation de cet inconfort vécu par les fidèles: une interprétation socio-organisationnelle où nous faisons appel aux sciences de la gestion et de l'organisation qui propose la reconnaissance de tous les acteurs dans les différents réseaux et une interprétation théologique qui propose une égalité fondamentale de tous les baptisés selon l'ecclésiologie communionnelle développée à Vatican II. Dans la troisième partie intitulée Pour une pratique partenariale, nous nous expliquons d'abord sur la réalité du partenariat et son rapport à l'égalité, puis nous plaidons en faveur d'une participation partenariale de tous les fidèles en Église. Enfin, nous formulons pour l'Église locale de Rimouski un projet de Restructuration partenariale. L'ensemble du projet s'inspire d'une philosophie dite de «gestion en réseaux»; non seulement compatible avec l'ecclésiologie fondamentale mais commandée par l'ecclésiologie pratique. Trois réseaux institutionnels sont touchés: la paroisse (avec son Assemblée paroissiale et sa Personne-relais), le secteur pastoral (avec son Équipe mixte de direction pastorale et son Conseil pastoral de secteur) et la région pastorale (avec son Animatrice ou Animateur de région et son Conseil de région pastorale).

Notre recherche est traversée par une vision de l'Église comme organisation appelant une gestion participative et un partage du pouvoir entre tous les membres de l'institution. De cette vision se dégage une idée-force prospective: les repères organisationnels actuels qui accentuent le pôle «institué» sont à repenser pour faire place aux forces novatrices du pôle «instituant». Le maintien d'une juste tension entre les deux pôles constitue la préoccupation majeure de la recherche. La restructuration proposée tient compte de l'autonomie des réseaux institutionnels et non institutionnels en même temps que de leur interrelation. L'horizon dernier ou le futur anticipé que nous souhaitons appelle un changement en profondeur, tant au niveau de la vision ecclésiale qu'au niveau des structures et des règles qui la régissent. Notre utopie est de croire que dans l'institution tous les membres puissent enfin sortir d'une «impuissance apprise».

Alternate abstract:

More and more faithful Christians are expressing expectations in the face of a lack of participation within their local Church, particularly with regard to their insertion da in the decision-making process. They want to get out of the clericalism of which they have been victims for centuries, given the categorization of members that such an ideology induces within the ecclesial institution. Today's cultural context and the return to the sources of what the Church is make it necessary to radically rethink the question of the participation of the laity in the internal management of the institution. This research attempts to unlock this impasse linked to a narrow conception of power and authority in the Church.

We proceed from a survey - 25 individual interviews and 3 round tables bringing together 27 people - carried out in the local Church of Rimouski with Christians and Christians involved or not involved in the institution. Our method is that of pastoral praxeology. Our observation data quickly led us to put forward the following hypothesis: despite the efforts of renewal and the good will, we are faced with a pyramidal ecclesiological model involving, at the institutional level, a centralizing and authoritarian organizational framework; however, a communional ecclesiological model could generate at the institutional level a different organizational framework, where all the actors would be stakeholders in the decision-making process. This is, in our opinion, an organizational approach which best translates the communional intuition which is at the foundation of the ecclesial reality.

The research is developed in three parts. In the first part, entitled Eloquent remarks on an incongruous situation, we specify the objectives of the investigation, establish the framework of the analysis, situate the local Church of Rimouski, identify and analyze what we were told about the Rimouski Church as an organization and on the management of parish communities. What emerges is that members see current structures too tied to a narrow view of the authority of ordained ministers. In the second part, which we call An ecclesial organization called to change, we proceed to a double interpretation of this discomfort experienced by the faithful: a socio-organizational interpretation where we call on the sciences of management and organization which proposes the recognition of all the actors in the different networks and a theological interpretation that proposes a fundamental equality of all the baptized according to the communional ecclesiology developed at Vatican II. In the third part entitled For a partnership practice, we first explain ourselves on the reality of partnership and its relation to equality, then we plead in favor of a partnership participation of all the faithful in the Church. Finally, we are formulating a partnership Restructuring project for the local Church of Rimouski. The entire project is inspired by a philosophy known as “network management”; not only consistent with fundamental ecclesiology but driven by practical ecclesiology. Three institutional networks are affected: the parish (with its Parish Assembly and its contact person), the pastoral sector (with its Mixed Pastoral Management Team and its Sector Pastoral Council) and the pastoral region (with its Regional Animator and its Pastoral Region Council).

Our research is crossed by a vision of the Church as an organization calling for participative management and a sharing of power between all the members of the institution. From this vision emerges a prospective key idea: the current organizational benchmarks that accentuate the “established” pole must be rethought to make room for the innovative forces of the “instituting” pole. Maintaining the right tension between the two poles is the main concern of research. The proposed restructuring takes into account the autonomy of institutional and non-institutional networks as well as their interrelation. The final horizon or the anticipated future that we desire calls for a profound change, both at the level of the ecclesial vision and at the level of the structures and rules that govern it. Our utopia is to believe that in the institution all the members can finally get out of a “learned helplessness”.